ISSN 2271-1813

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Dictionnaire de la presse française pendant la Révolution 1789-1799

C O M M A N D E R

   

Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 632

JOURNAL D'AMSTERDAM, JOURNAL DE HAMBOURG (1694-1696)

1Titres Journal d'Amsterdam, contenant divers memoires curieux & utiles sur toutes sortes de sujets.

Devient en septembre 1694: Journal de Hambourg, contenant divers memoires curieux & utiles sur toutes sortes de sujets.

2Dates Février 1694 - lundi 5 avril 1694 (J.A.); 3 septembre 1694 - 27 avril 1696 (J.H.). Sous deux titres différents, il s'agit du même journal. A partir du nº 3, daté du 15 février, le J.A. devient en principe hebdomadaire; mais les nº 1, 2 et 3 sont sans doute édités en même temps, car les cahiers se suivent: A-G, + H (tables). Le numéro du 15 mars est lui-même composé de plusieurs alinéas datés (22, 29 mars et 5 avril). La périodicité n'a sans doute pas été respectée. Par contre, le J.H. est publié chaque semaine, avec quelques interruptions: de fin 1694 à avril 1695 (cf. avis du t. II), et en novembre 1695: au total, 17 numéros ont paru en 1694, 32 en 1695, 16 en 1696, soit en tout 65 numéros.

3Description J.A.: un volume de 114 p. comportant Avis, Avertissement, texte (15 févr. - 5 avril) p. 9-114 + 5 p. de tables non chiffrées.

J.H.: 4 volumes. T. I (276 p.): 3, 10, 17, 24 sept., 1, 8, 15, 22, 26 oct., 5, 12, 19, 26 nov., 3, 10, 17, 24 déc. + dédicace, avertissement et «indice des matières». T. II (208 p.): 1, 8, 15, 22, 29 avril, 6, 13, 20, 27 mai, 3, 10, 17, 25 juin + «indice des matières». T. III (304 p.): 3, 8, 15, 22, 29 juil., 5, 12, 19, 26 août, 3, 12, 16, 23, 30 sept., 7, 14, 21, 28 oct. et une «dernière feuille du 3e tome pour tout le mois de novembre», + «indice des matières». T. IV (256 p.): 13, 20, 27 janv., 3, 10, 17, 24 févr., 2, 9, 16, 23, 30 mars, 6, 13, 20, 27 avril + «indice des matières du quatrième tome».

Toutes les livraisons sont composées de cahiers de 16 p. in-8º, 92 x 145 (J.A.) ou 95 x 170 (J.H.). Une planche de médailles dans le nº 1 de J.A., 5 planches au nº 3; une planche de médailles dans chaque volume du J.H., et un dépliant (vue de Bassura) dans le t. I, p. 235.

4Publication «A Amsterdam, Chez Nicolas Chevalier, dans le Kalver-Straat, près l'Osse-sluys au Chevalier curieux» (J.A.). «A Hambourg, Chez Henry Heus Marchand Libraire près la Banque, avec Privilège».

5Collaborateurs Gabriel d'ARTIS, signataire de l'«Epître dédicatoire aux Seigneurs du Sénat de la Ville & République de Hambourg» (J.A.).

6Contenu Avertissement du J.A.: «Il aura divers Articles séparez, entre lesquels la Littérature tiendra toujours le premier rang». Pour se distinguer de deux auteurs célèbres (Bayle et Basnage?), d'Artis donnera peu d'extraits, mais publiera surtout les mémoires qui lui seront communiqués, les bonnes pages d'ouvrages en cours de rédaction. Il espère en particulier des mémoires sur la peinture, l'architecture, les médailles, les monuments, «les productions de la Nature qui auront quelque chose de nouveau, de rare ou d'extraordinaire, & toutes celles dont les Sciences, les Arts, le génie, l'industrie, les voyages, les soins, les travaux & les diverses occupations des hommes enrichissent la Société». Sont donc représentées, de façon assez irrégulière, les rubriques Littérature, Monuments, Machines (la machine de Marly), Peinture, Productions de la Nature, Mechaniques, Antiquités, Evénements extraordinaires (calamités naturelles survenues en France après la Révocation); on trouve à la fin du nº 3 deux «devis» ou descriptions de tableaux de Testelin et du Tintoret. Quelques comptes rendus d'éditions: les Œuvres de Rabelais (p. 49-51), les Œuvres de Saint-Evremont (p. 57-61).

Dans l'Avertissement du J.H., d'Artis fait appel aux lecteurs, pour lui fournir des mémoires et documents qui s'adjoindront à ses propres comptes rendus et articles divers: «On ne trouvera pas mauvais sans doute que j'égaïe, autant qu'il m'est possible, les sujets que je traite, ni que j'en mesle de tems en tems de moins sérieux, & de moins importans. Ce meslange a ses bons usages...». Les comptes rendus de G. d'Artis sont plutôt des articles, avec des commentaires personnels: par exemple sur l'Alcoran traduit par Hinckman (t. I, nº 1), la vie de Cromwell par G. Leti, sur la condamnation du théâtre par le père Caffaro, sur un roman (Les Effets de la jalousie ou la Comtesse de Chateaubriand, t. II, nº 10), etc. Mais ces ouvrages sont plus souvent pour lui l'occasion d'exprimer son point de vue sur des sujets de théologie et d'histoire religieuse.

7Exemplaires B.N., Z 20200-20203.

8Bibliographie D.B.F., DP2.

Historique D'Artis, suspendu dans ses fonctions de pasteur de l'église du Dôme à Berlin, semble avoir hésité assez longtemps avant de s'établir à Hambourg. L'Epître dédicatoire aux Seigneurs du Sénat de la Ville de Hambourg et l'Avis au Lecteur publié à la fin du J.A. témoignent de ces hésitations. Dans la première, il écrit: «J'étois tout porté à Amsterdam; mais mon inclination donnoit la préférence à Hambourg [...] C'est ce qui m'a fait résoudre à commencer mon Journal sous le titre de Journal d'Amsterdam, & à prendre en même tems les mesures nécessaires pour le pouvoir continuer sous le titre de Journal de Hambourg». Dans son Avis au Lecteur, il annonce la continuation du J.A. sous le titre de Journal de Hambourg: «Ce changement causera une interruption de quelques mois, après laquelle on tâchera d'en donner la suite sans aucune autre discontinuation». Attiré par la présence en Hollande de Bayle et de Basnage, dont il a subi profondément l'influence, assuré d'y trouver également des bibliothèques et des collaborateurs, il semble avoir redouté en même temps la concurrence, et avoir voulu garder le public des protestants français d'Allemagne, et la protection de mécènes de premier plan comme les ducs de Brunswick et Lunebourg, «protecteurs de la bibliothèque de Wolfenbuttel», à qui est dédié le t. IV du J.H. Ce qui est certain, c'est qu'il considère ses deux publications comme un seul journal dont il a toujours gardé le plan en tête. La formule qu'il inaugure dans ce journal est originale. Il songe moins à composer une bibliothèque savante qu'à créer un réseau de collaborateurs bénévoles, unis par la même idéologie, et à faire de sa revue un journal d'opinion, véritablement militant. La réflexion actuelle, prise souvent d'ouvrages en cours d'élaboration, lui importe plus que l'érudition ou l'histoire. Les œuvres qu'il commente sont pour lui prétexte à des réflexions sur les grands problèmes qui divisent catholiques et protestants (problème de l'Eucharistie, à propos d'un traité de Pellisson, ou de la «lumière naturelle» et de la «présence réelle» à propos de la Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques de Dupin, dans le t. I). Ses articles témoignent de fortes convictions et d'un tour d'esprit très caustique quant aux variations de l'Eglise catholique sur le théâtre, sur l'Inquisition et sur la superstition, qui menacent en fait tous les Etats catholiques (t. II, 10 juin): la France en particulier est envahie par la «moinerie» et risque de plonger dans un «temps de ténèbres» (t. II, p. 163-166). D'Artis ne souhaite pas un retour à l'Edit de Nantes, mais plaide pour le repentir de l'Eglise et une tolérance générale (t. II, p. 167-172). Ce plaidoyer pour la tolérance se développe dans de nombreux articles: sur la Révocation (l'Histoire de l'Edit de Nantes de Benoît, t. III), sur les réformés de France (t. III, p. 209 et suiv.); il anime ses discussions avec Bayle (t. IV, p. 149-173). De cette conviction témoigne sa correspondance avec Bayle, à qui il a soumis le premier numéro du J.A. (cf. lettre à Bayle du 6 avril 1694, Inv. Labrousse, nº 920), et avec Leibniz (cf. Der Briefwechsel des G.W. Leibniz, éd. E. Bodemann, Hannover, 1889, nº 18, 15 lettres de G. d'Artis, de 1695-1696, à propos du J.H.). Par sa passion militante, son ironie, son rêve de tolérance universelle, d'Artis apporte à la presse protestante un ton particulièrement véhément, qui lui fit certainement beaucoup d'ennemis. On ne sait pour quelles raisons il a abandonné son journal en avril 1696; mais en avril précisément, il fut rétabli dans ses fonctions de pasteur à Berlin. Il écrit, à la fin de son t. IV: «Ce sera ici la dernière feuille du quatrième Tome de ce Journal. Quelques occupations particulières m'obligent à en interrompre le cours un peu de tems. Mais c'est pour le reprendre le plus tôt qu'il me sera possible, & pour me mettre plus en état de remplir le Plan que j'en donnerai avant de commencer». Il eut sans doute à négocier à cette époque les conditions de son retour à Berlin, mais cette négociation ne semble pas avoir abouti avant 1700, et durant cet intervalle de quatre années, nous ne savons rien de lui.

Jean SGARD

 


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