ISSN 2271-1813

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Dictionnaire de la presse française pendant la Révolution 1789-1799

C O M M A N D E R

   

Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 228

LE CONTRÔLEUR DU PARNASSE (1745-1748)

1Titres Le Controlleur du Parnasse, ou Nouveaux Mémoires de Litterature Françoise & Etrangère, en Forme de Lettres, «pour servir de préservatif contre les faux Jugements de M. l'Abbé Des Fontaines caché sous le nom de M. Burlon de la Busbaquerie, et de quelques autres Journalistes ineptes ou infidèles. Pr M. Le Sage de l'Hydrophonie».

2Dates La feuille de l'abbé d'Estrées a commencé à paraître en mai 1745. Les premières livraisons comportent environ 120 p. et paraissent à un rythme irrégulier: la Lettre I est datée du 24 mai, les Lettres II et III sont de juillet. Dans une lettre du 11 juin 1745, Bonardy signale à Bouhier que dix feuilles ont déjà paru (Correspondance littéraire du président Bouhier, publiée par H. Duranton, nº 5, Université de Saint-Etienne, 1977, p. 122), ce qui pourrait correspondre à deux livraisons. A la fin de la Lettre VIII, un avis signale que la livraison ne dépassera plus 48 ou 60 p., mais, ajoute le rédacteur: «j'en publierai une régulièrement tous les dix ou quinze jours; et les ordinaires seront même si réguliers que je crois inutile de les annoncer davantage» (t. II, p. 437-438). La Lettre VIII, qui termine le t. II, est datée du 28 novembre 1745; la Lettre IX, au début du t. III, est datée du 21 décembre 1745. La Lettre XII est datée du 1er février 1748. On trouve au début du t. III et à la fin du t. IV un catalogue de M.M. Rey avec une annonce du Controlleur, «qu'on donne tous les mois»; cette périodicité n'a pas été respectée longtemps; la réédition en volumes semble se faire en outre avec un retard notable.

3Description Douze livraisons en trois tomes et une livraison séparée. Le t. I comporte, outre un Avertissement et une Lettre préliminaire (CXIV p.), 3 livraisons de 120, puis de 60 p., soit au total 244 p.; le t. II réunit les Lettres IV à VIII et compte 444 p.; le t. III réunit les Lettres IX à XI et compte 376 p.; la collection de la B.N. comporte un t. IV, dans lequel se trouve une Lettre XII de 117 p. Les livraisons sont composées de plusieurs cahiers de 24 p., format in-12, 95 x 160. Chaque volume devait compter 456 p.; en fait, aucun n'a atteint ce nombre.

Devise: Quid verum atque decens curo & rogo, & omnis in hoc sum. Hor. Epist. 1.

4Publication «A Berne. Chez les Frères Volf & Fleischman; Imprimeurs-Libraires des XIII Cantons, à l'Image du Cynique en rabat. Avec Approbation des Pasteurs & Privilège de Messieurs les Bourgmestres». Cette enseigne est certainement humoristique. Le t. III porte l'adresse de M.M. Rey, Amsterdam (ex. de Genève); comme les catalogues publiés dans les t. s III et IV (ex. de la B.N.) donnent M.M. Rey comme diffuseur du Controlleur, il est fort probable qu'il en a été l'éditeur depuis le début. On ne remarque d'ailleurs pas de différence de fabrication entre les premiers et les derniers volumes.

L'éditeur précise à la fin du t. II que le prix est calculé au nombre de feuilles: «Le prix de cette Lettre est de 20 sols de France, & celui du volume complet de 3 # 10 sols, étant composé de dix-neuf feuilles & par conséquent de quatre plus que ceux du Journaliste d'Avignon [i.e. Jugements sur quelques ouvrages nouveaux, de Desfontaines] qui se sont toujours payés 3 livres» (t. II, p. 444).

5Collaborateurs Jacques DESTRÉES. Le nom de l'abbé Destrées (ou Detrée) est déjà prononcé par Bonardy dans sa lettre du 11 juin 1745 (t. V, p. 122), et surtout par J.B. Michault dans une lettre à Bouhier du 19 mai 1745 (t. V, p. 132). La France littéraire de 1769 reprend cette attribution pour l'ensemble des trois volumes. L'éditeur du journal (vrai ou supposé) écrit en fin du t. II: «Je vous avois annoncé dans ma lettre préliminaire que pour ne pas m'exposer à de certains reproches que l'Observateur [i.e. Desfontaines] a souvent essuyés je n'associerais personne à mon travail à l'exception de M. l'Abbé D'E... sur qui je me suis déchargé du soin des articles qu'on ne peut traiter qu'en étant à Paris» (p. 436). Il ajoute quelques pages plus loin qu'il recourt parfois à un second collaborateur, qui n'est pas Meusnier de Querlon (p. 437).

6Contenu La Lettre préliminaire du t. I offre une suite de réflexions générales sur les devoirs du journaliste. Ancien collaborateur de Desfontaines, Destrées se présente à sa succession: «C'est donc l'âme de M. l'Abbé D.F. que je vais essayer de vous rendre ici». Comme Desfontaines, Destrées veut donner, sous forme de lettres personnelles et vivantes, une critique littéraire de goût (p. XCVII-XCVIII), mais sans céder à la satire et en évitant les digressions (p. LXXX). Cherchant à se faire un nom dans la carrière journalistique, il fait surtout acte d'allégeance à l'égard de Voltaire, dont il attaque les ennemis: Desfontaines en premier lieu, puis, après la mort de celui-ci (16 déc. 1745), Fréron, qui publie à cette époque les Lettres de Mme la Comtesse. Dès la Lettre II, Destrées publie des œuvres de Voltaire, comme le Poème de Fontenoy; dans les Lettres IV, V et VIII, il commente longuement l'«Avis à un journaliste», publié dans le Mercure de novembre 1744. Malgré ces déclarations d'intention, Destrées reste étroitement tributaire de la manière de Desfontaines; et comme il semble pressé par le temps, il lui arrive de plus en plus de mêler à ses comptes rendus littéraires, des pièces d'histoire, des causes célèbres, et de rompre des lances avec ses rivaux, tout ceci, semble-t-il, sans grand succès.

7Exemplaires B.N., Z 20215-20218; B.P.U. Genève, Hf 1778; B.M. Grenoble, F 19059; B.M. Aix, 4º 7806.

8Bibliographie Mattauch H., Die Literarische Kritik der frühen französischen Zeitschriften (1665-1748), München, 1968, p. 314-315.

Historique L'histoire du Controlleur du Parnasse a été mouvementée et reste assez mystérieuse. L'abbé Destrées, sans doute le «Cynique en rabat» de la page de titre, se fait remarquer, dès les premières feuilles de son journal, par sa virulence; «il met en pièces beaucoup d'honnêtes gens», remarque J.B. Michault dans sa lettre du 19 mai 1745; et Bonardy parle d'«écrits violents et diffus». Le 26 janvier 1746, Destrées est conduit à Vincennes et interrogé par Marville: «Il convient d'être l'auteur du Controlleur du Parnasse, a commencé l'ouvrage sous l'espérance d'un privilège que M. le Chancelier lui avait promis. D'abord imprimé à Genève puis chez un nommé Petit, imprimeur à Rouen» (Ars., ms. 11593, fº 410). Il restera trois mois en prison, avant de recevoir sa lettre d'exil. Il ne quitte cependant pas Paris. Il est peu probable, comme nous l'avons dit, que son journal ait été publié en Suisse, même si sa Lettre préliminaire est datée de Berne le 28 novembre 1745. On notera d'ailleurs qu'il se présente dans cette lettre en successeur de l'abbé Desfontaines, mort le 11 décembre; la date du 28 novembre doit donc également être fausse. Il est fort probable qu'il a surtout cherché à se faire bien voir de Voltaire; mais celui-ci l'a complètement ignoré. Après sa sortie de Vincennes en mars 1746, Destrées ne fait plus parler de lui, et sans doute a-t-il cessé de publier son journal pendant quelques mois. Aucun autre auteur n'ayant jamais été proposé pour les derniers volumes du Controlleur, l'attribution de l'ensemble de la publication à Destrées, donnée par la France littéraire de 1769, est fondée.

Jean SGARD

 


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© Universitas 1991-2024, ISBN 978-2-84559-070-0 (édition électronique)